Au diable Vauvert

Maison d’édition indépendante, pop et urbaine installée en Camargue, à Vauvert dans le Gard.

© CChicxulub FMassé

[Rencontre proposée par la médiathèque départementale du Gers le 10 février 2023]

 

Quelques questions à Marion Mazauric, éditrice Au Diable Vauvert

 

Créée en l’an 2000 par Marion Mazauric, sa gérante actuelle, Au diable vauvert a publié près de 600 titres et vendus plus d’un million d’exemplaires en vingt-trois ans, principalement en littérature française et étrangère, en jeunesse, mais aussi en poésie, histoire culturelle, écologie et territoire.

 

Pourquoi êtes-vous devenue éditrice ?

Pour changer le monde ! Etre éditeur c’est être éveilleur d’idées, armer les esprits, agrandir les imaginaires et les mots, créer du lien, du partage, du débat, de l’intelligence, et de la mémoire. 

Les livres ont baigné mon enfance et ma jeunesse, c’était à la fois l’espace de l’intime, celui de la poésie, des émotions et du sens et une porte d’entrée sur l’univers entier, mais aussi "l’arme de paix" qui change le monde. Je n’imaginais pas ma vie sans œuvres de langages, une vie professionnelle qui ne soit au service des mots, des auteurs. Et après avoir gouté la bibliothèque et la librairie, c’est en organisant un prix de poésie étudiant que j’ai choisi ce métier. 

Si vous êtes d’un tempérament actif, il satisfait à la fois la passion de la littérature et le goût de l’engagement, du risque et de l’action .

Photo de Marion Mazauric. Copyright CChicxulub FMassé

Le livre que vous avez édité et qui a tout changé pour vous ?

Il y en a tant ! Je ne sais pas si finalement ma vie n’a pas été changée que par les livres, en commençant par le tout premier, l’Iliade.. Et parmi ceux que j’ai publiés, Ayerdhal et Stephen King ont changé réellement ma vie en ouvrant des portes insoupçonnées à la jeune éditrice fraîche émoulue de l’université que j’étais..

Mai au Diable, il y a bien sur notre premier livre publié Mémoire courte de Nicolas Rey, prix de Flore à sa parution, qui a propulsé la maison, puis les trois grands best-sellers que furent Un léger passage à vide dix ans après du même Nicolas Rey, Le liseur du 6h27 en 2014 et Crépuscule de Juan Branco en 2019 : à chaque fois, un titre à 100.000 exemplaires permet à une maison indépendante de franchir un palier et lui apporte de la reconnaissance.

Le message que vous souhaitez faire passer ?

Je souhaite que le livre et la lecture restent, malgré tous les dangers qui pèsent sur son économie et sa sociologie, cet espace de tolérance et de diversité, de pluralisme des idées, cultures et opinions que la librairie a toujours préservé.

Que le monde du livre sache résister à toutes les normalisations et interdits qui menacent.

Le fait que les non-lecteurs en France soit passés de 15 à 40% en moins de trente ans nous alerte sur ce que deviendra notre pays si le livre s’y confirme comme un marqueur de la distinction culturelle voire un instrument idéologique domination, au lieu d’être un enrichissement pour tous, un instrument de la liberté de penser et de rêver fait pour et par tous.

Votre actualité ?

Alfie est notre meilleur vente, en ce moment, c’est le premier roman adulte de Christopher Bouix, un nouvel auteur qui arrive au Diable avec un livre très drôle, jubilatoire même, très emblématique de notre catalogue, dont le narrateur est une IA domestique, Alfie. 

Dans un mélange des genres brillant et assumé, il nous conduit de Roland Barthes à Agatha Christie et Dick, dans une ambiance qui oscille entre satire, polar et comédie familiale. 

A la fin, on a lu (en riant beaucoup) un roman d’une grande intelligence sur la société du contrôle, riches de multiples niveaux de lecture, et en même temps un livre-plaisir pour toutes les tranches d’âges et tous les lecteurs, de littérature mainstream comme de sf, polar ou jeunesse.

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