Pouvez-vous revendiquer la protection de votre œuvre par les droits d’auteur ?

Publié le 07/07/2021
Avocat
Bruno Carbonnier
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Catégorie(s)
La protection des oeuvres
Les droits d'auteurs (atteinte)
Les droits d'auteurs (étendue)
Les droits d'auteurs (titulaires)

Qu’est-ce qu’une œuvre ?

Selon l’article L111-1 du code de la propriété intellectuelle, les droits d’auteur appartiennent à l’auteur d’une œuvre de l’esprit. 

La notion d’œuvre est donc centrale : or il n’existe pas de définition légale de « l’œuvre », et ce même si l’article L112-2 du code de la propriété intellectuelle donne une liste, non exhaustive, de créations considérées comme des œuvres de l’esprit (les livres, les compositions musicales, les dessins, etc.). Cela étant, malgré cette absence de définition, certains critères sont inopérants. C’est le cas notamment de la forme d’expression, du genre, du mérite de l’auteur ou encore de la destination de l’œuvre.

L’« œuvre de l’esprit » protégée par des droits d’auteur est donc entendue très largement, mais encore faut-il que la création en question réunisse certaines conditions. 

Quelles conditions sont exigées pour revendiquer la protection d’une œuvre par les droits d’auteur ?

Une création de forme 
Il faut incarner et matérialiser une création. L’œuvre doit prendre forme. En effet, le droit d’auteur ne peut protéger de simples idées ou informations. Il faut que l’idée soit perceptible par les sens. Ici, aucun support n’est imposé (papier, vidéo, partition…). La longueur et la pérennité de l’œuvre n’importe pas non plus. 

Une création originale 
C’est la condition générale qui n’est pas définie par la loi. La jurisprudence a adopté une conception classique de cette originalité. Il s’agit de l’empreinte de la personnalité de l’auteur. 
Pour des œuvres plus technologiques, on parlera d’effort personnalisé, d’apport créateur. 

L’œuvre doit donc procéder d’une activité créative et ne peut résulter de la mise en œuvre d’un simple savoir-faire, ce dernier n’étant pas protégé par les droits d’auteur. Récemment, dans un arrêt du 30 mars 2021, n°19/00672, la cour d’appel de Versailles a rappelé que le savoir-faire d’un photographe portant notamment sur le cadrage, les retouches, ne se confond pas avec l’originalité de l’oeuvre.

Il reviendra donc au juge de trancher ce critère de l’originalité. En cas de contestation, l’auteur devra alors justifier de l’originalité de l’œuvre dans la mesure où il ne bénéficie que d’une présomption. 

Exemple de refus du critère de l’originalité
CA Colmar 11 mai 2020, n° 18/00366 : Dans cette affaire, la Cour a considéré que des photographies étaient dépourvues d'originalité car la preuve de choix artistiques ou intellectuels permettant de refléter l'empreinte de la personnalité de l'auteur n’était pas apportée. 

Conclusion 

Lorsque les conditions sont réunies, à savoir l’existence d’une création de forme qui est originale, l’auteur acquiert instantanément des droits sur cette œuvre de l’esprit, appelés les droits d’auteur. 
En qualité d’auteur, il jouit alors sur ses œuvres, en vertu de l’article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. 
Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres Ier et III du même code.