La protection d’une œuvre par le droit d’auteur

Publié le 13/09/2019
Avocat
Pauline Planc
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La protection des oeuvres
Les droits d'auteurs (atteinte)
Les droits d'auteurs (étendue)
Les droits d'auteurs (titulaires)

La protection d’une œuvre par le droit d’auteur s’acquiert dès sa création, de facto, sans qu’il ne soit besoin d’accomplir de formalités d’enregistrement. Le code de la propriété intellectuelle dispose ainsi dans son premier article L111-1 que « l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ».

En conséquence, contrairement à certaines idées reçues, le dépôt d’un livre à la Bibliothèque Nationale de France ou l’utilisation d’une enveloppe « Soleau » de l’Institut National de la Propriété Intellectuelle ne crée aucun droit d’auteur au profit de leur déposant. Ces formalités s’avèrent toutefois utiles en ce qu’elles permettent d’établir la preuve de la qualité d’auteur du déposant de l’œuvre.

Néanmoins, même si la naissance de droits d’auteur résulte de la seule création d’une oeuvre, sans aucune autre formalité à accomplir, il n’en reste pas moins que la revendication de tels droits implique de démontrer l’existence d’une œuvre de l’esprit, et d’établir la qualité d’auteur de son créateur. 

S’agissant de la qualification d’œuvre de l’esprit, il faut souligner qu’elle est indifférente au genre de l’oeuvre, de sa forme d'expression, de son mérite ou de sa destination. Ainsi, si l’article L112-2 du code de la propriété intellectuelle fournit une liste d’œuvres réputées constituer des œuvres de l’esprit protégées par le droit d’auteur, elle n’est toutefois pas exhaustive. Il importera essentiellement pour retenir la qualification d’œuvre de l’esprit de constater que la création est formalisée et sort du champ des idées, et qu’elle est porteuse d'une certaine originalité. Attention, cette originalité n’est pas entendue comme la démonstration de la nouveauté de l’œuvre, mais bien comme celle de l’empreinte de la personnalité du créateur sur l’œuvre et de ses choix créatifs. Le constat que l’œuvre est inachevée ou qu’elle n’ait pas encore été diffusée n’est pas non plus un obstacle à sa protection par le droit d’auteur.

S’agissant de la qualité d’auteur, elle appartient au créateur de l’œuvre selon l’article L111-1 du code de la propriété intellectuelle. Il est utile de relever que l’article L113-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit une présomption de titularité à celui ou ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée, mais que cette présomption peut être renversée. Les articles L113-2 et suivants dudit code encadrent, eux, la titularité des droits d’auteur d’œuvres spécifiques, avec parfois quelques aménagements au principe édicté par l’article L111-1 du code de la propriété intellectuelle (il s’agit des œuvres de collaboration, composite, collective, audiovisuelle, logiciels etc.).

Bien souvent la titularité des droits d’auteur d’un créateur sur son œuvre est sujet à questionnement en présence d’un contrat conclu avec un tiers, lorsque ce contrat concerne la création de l’œuvre. L’article L111-1 du code de la propriété intellectuelle répond alors à cette problématique en consacrant le principe selon lequel l'existence d’un contrat de louage d'ouvrage ou de service conclu par l'auteur d'une oeuvre de l'esprit n'emporte pas dérogation à la jouissance de ses droits d’auteur. Toutefois, il s’agit d’un principe assorti de quelques exceptions, qui sont également édictées dans le code de la propriété intellectuelle (elles concernent par exemple le salarié dont les fonctions seraient de réaliser un logiciel). 

Dès lors que le créateur établit l’existence d’une œuvre de l’esprit originale dont il est l’auteur, il peut opposer à tout tiers ses droits de propriété exclusifs dont il est titulaire sur sa création. Ces droits se composent d’attributs d’ordre moral qui sont perpétuels et inaliénables, et de droits patrimoniaux qui perdurent en principe jusqu’à 70 ans après la mort de l’auteur. Pendant cette durée, l’auteur peut donc faire sanctionner les actes de contrefaçon de son œuvre, lesquels se définissent comme toute représentation ou reproduction de l’œuvre faite sans son consentement selon l’article L122-4 du code de la propriété intellectuelle. Il est important de souligner que l’acte de contrefaçon peut consister en une représentation ou reproduction intégrale de l’œuvre, mais également en une représentation ou reproduction partielle. Dans cette dernière hypothèse, les juges se fonderont sur la reprise des éléments originaux de l’oeuvre contrefaite pour caractériser ou non l’existence d’une contrefaçon par imitation, et ce même s’il peut exister des différences entre les deux œuvres, et même en l’absence de risque de confusion pour le public.